street art bordeaux :

la street interview de monsieur poulet

Monsieur Poulet
Poulet
Jamais grandir

« JAMAIS grandir ! » nous lancerait son poulet, pris en flagrant délit de « bêtises ». Gambadant à droite, à gauche, en ville ou ailleurs, sa vie est ponctuée d’aventures, de gags et d’insouciance.

Qui se cache derrière lui ? Son créateur : Monsieur Poulet.

Alors, fan de street art, après avoir découvert les bons conseils de l’abeille de Fred Rush Collins, les animaux – tout à fait uniques – d’A-MO et le Mimil – mi-homme mi animal – de David Selor, fais-toi plaisir et plonge dans l’univers – cocasse et enfantin – de Monsieur Poulet.

 

ça papote avec monsieur poulet

Parce qu’il repeignait sa fresque, Monsieur Poulet nous a donné rendez-vous avenue de Tivoli, à l’intersection du Boulevard Pierre 1er. 

comment tout a commencé ?

Alors, moi j’ai découvert le graffiti au début des années 90, 93 quelque chose comme ça. Et j’ai un pote qui m’a mis un magazine entre les mains, 33 C’Fresh, le premier magazine de graffiti à Bordeaux, en noir et blanc.

il existe toujours ?

Il n’existe plus, y’a eu 2 numéros et c’est fini, c’était un magazine en mode vente sous le manteau, que local, photocopié. Quand j’ai vu ça j’ai fait « qu’est-ce que c’est ?! » Ça m’a mis une grosse claque dans la gueule, faut que je fasse pareil c’est obligé !

Du coup je me suis lancé là-dedans. J’ai fait comme tout le monde, les chromes, du lettrage, j’ai testé différentes choses mais bon c’est les années 90 pas les années 2020. Tu vois si je faisais mon poulet dans les années 90, je me prends une balle, je me fais tirer dessus, c’est sûr. Là maintenant c’est rentré dans les mœurs donc c’est plus simple on va dire.

Bref, du coup dans les années 90, adolescent je fais mes bêtises, les chromes, les lettrages, les terrains vagues et en fait, je me fais serrer deux fois coup sur coup. Ça me calme un peu.

Ouais c’était à Bordeaux, vers Caudéran, j’avais tagué les maisons. J’ai arrêté quelques années mais j’ai un peu suivi le mouvement s’tu veux et un beau jour, y’a internet qui arrive… J’suis vieux, j’ai découvert l’arrivée d’internet et avec y’a eu les premiers sites sur le graffiti dont un qui parlait de ce qu’il se passait dans la région, dans le grand Sud-Ouest.

Car le graffiti tu vois, y’a beaucoup de choses qui se passent dans des friches ou dans des endroits où c’est effacé au bout de quelques jours donc tu vois pas forcément.

Maintenant y’a internet, on voit tout, je pourrais faire une story, les gens le verraient instantanément mais « avant », les photos elles se posaient sur les magazines, les sites internet. Y’avait pas encore cette interaction et donc du coup j’ai découvert un site internet qui parlait du graffiti dans la région et y’a un truc qui arrivait…C’est pas du graffiti, c’était pas de l’art, c’était pas de l’art contemporain, y’avait pas encore de mot pour ça. Après c’est devenu le street art, pendant un moment on appelait ça post graffiti, parce que c’était des gens qui peignaient dans la rue, dans des friches, mais ils faisaient plus de lettres, ils partaient dans des trucs abstraits.

Et pareil, je regardais le graffiti de loin, je m’intéressais encore un peu et quand j’ai vu ça j’ai dit « vas-y faut que je revienne dans le game » !
Et puis j’ai commencé à faire des collages dans la rue, des jeux de mots illustrés genre je prenais un jeu de mots et j’illustrais, genre Kiwi Slater, je faisais un kiwi qui faisait du surf et puis petit à petit je me suis remis à la bombe et puis plutôt que de faire plusieurs trucs je suis parti sur un dessin qui était un personnage un peu naïf, qui a attiré la sympathie.
Au début, j’ai pris un pingouin, il était pas super, ça allait pas trop et je suis parti sur un poulet, j’ai rajouté une crête, ça a fait un poulet, j’ai fait des jeux de mots, poule de luxe, napouléon, Jean Poule Gauthier…
Petit à petit je suis revenu à la peinture, je l’ai beaucoup stylisé, il a beaucoup changé dans la forme, dans les couleurs et puis maintenant il a c’te forme là.

et donc ton personnage, il te ressemble un peu niveau caractère ?

Ouais, j’essaie d’être comme lui. Je lutte avec les démons, je suis pas quelqu’un qui est toujours de bonne humeur, lui il l’est, et quand je vois les gens dans la rue qui disent « ah c’est cool, y’a mes enfants qui vont venir te voir »… Ça donne la pêche !

L’idée c’est, je suis plus un vandale, j’essaie de faire des trucs un peu joyeux, positifs, amener de la couleur, y’a aucune mauvaise intention dans ce que je fais. Je suis pas une racaille, je vais pas insulter les gens, je vais pas mettre des messages gênants envers la police. Je suis père de famille.

bienveillant, accessible, léger, rigolo…

Voilà : humoristique… Des fois il peut être un peu taquin, il peut faire des bêtises le poulet mais généralement il est quand même sympa. C’est un peu aussi à l’image de la ville, et du coin, le Sud-Ouest c’est quand même une belle région, t’es à la plage, il fait beau, c’est un peu à l’image de tout ça. On est bien !

ton poulet il a beaucoup voyagé ?

Alors pendant un moment, j’ai beaucoup voyagé ouais. J’ai fait des grandes villes, Amsterdam, Berlin, New York, Londres, Madrid, Barcelone… À chaque fois j’amenais des trucs, je peignais, je collais des affiches toujours en rapport avec le lieu mais plus ça va, plus j’ai peur de l’avion donc mon rayon d’action se limite à ce que je peux faire en voiture.

tu es repassé dans ces villes pour voir si ton travail y était, c’est éphémère mais bon…

Certains, ça a pas duré une semaine, après c’est des villes qui bougent beaucoup. Barcelone y’a tellement de monde là-bas !

ton personnage tu le mets en scène avec son environnement, y’a toujours un lien, il aime raconter des histoires ?

Ouais j’aime bien raconter des histoires. Là pour le coup, y’a pas vraiment d’histoire à raconter même si, si on a un talent de brodeur, on peut arriver à broder une histoire avec ça mais globalement j’essaie d’interagir avec l’environnement quand c’est possible. Dans la rue comme ça, y’a « que des murs » je peux pas vraiment interagir avec l’environnement.

Quand je vais dans des friches ou dans des endroits abandonnés, tu vois, je regarde beaucoup les maisons qui vont être détruites, y’a souvent un panneau devant. Quand je peux y rentrer, de temps en temps, la magie opère. J’trouve des maisons avec tout dedans, tu vois comme si les gens étaient partis hier. Donc quand je tombe dans ce genre d’endroit et que je suis sûr et certain que ça va être détruit, là, je peux me dire je vais faire une mise en scène. Par exemple y’a pas longtemps j’ai trouvé une maison où dedans y’avait la télé, les canapés, table basse, bibliothèque, y’avait tout quoi.

Une semaine après elle était rasée et moi du coup dedans j’ai vu la télé, j’ai vu les canapés, j’ai fait un poulet qui regarde la télé avec les yeux qui tournent. Ce genre de mise en scène que j’aime bien.

c’est génial !

Ouais, c’est des bonnes expériences parce qu’aussi, ça te force un peu à regarder, à sortir de la ville, parce que la pression foncière elle est telle que, ouais trouver des trucs abandonnés à Bordeaux c’est très compliqué et du coup dans les périphéries c’est plus simple on va dire.

et le site à floirac bel sito ?

J’y vais pas. Y’a trop de monde qui y va.

c’est chargé là bas ?

Ouais, tu te repasses les uns les autres. En fait moi j’aime bien les murs vierges pour avoir plus de grains, plus de textures, jouer avec la matière.

« jamais grandir » ça représente ton poulet aussi ?

Ouais ça représente un esprit, rester un enfant, s’émerveiller de tout, rester innocent. C’est des choses que moi j’essaie d’inculquer à mon fils, il a quatre ans, il découvre la vie, tout est génial, tout est beau et quelque part on perd notre innocence quand on grandit.

« Jamais grandir », des fois je l’associe avec « toujours sourire », « jamais grandir toujours sourire », c’est un peu le leitmotiv.

ton site internet s’appelle jamais grandir d’ailleurs ?

Ouais ouais

 « cool vibes », c’est venu comment, toujours dans le même esprit ?

Ouais, le même esprit, je fais partie d’un crew graffiti qui s’appelle CV. C’est une équipe, ça fait 25 ans qu’on existe. Je suis pas le fondateur du tout. Moi je suis arrivé après et avec ces deux lettres C et V, on peut essayer de faire des mots, des phrases. Y’a eu Choc Visuel, Chari Vari. De temps en temps, je mets Cool Vibes, c’est des bonnes vibrations.

est-ce que y’a une poulette ?

Ouais, de temps en temps je modifie un peu le bec pour faire une poulette, je le fais pas très souvent, je préfère qu’il reste ni garçon, ni fille. En général c’est ni l’un ni l’autre.

on parlait d’éphémère, c’est important pour toi de prendre des photos

Ouais, la photo c’est le plus important pour moi. Tu vois si je suis une bête de peinture et que j’ai une mauvaise photo, pour moi ça sert à rien. Ça m’obsède. C’est toujours un peu dans le contexte tu vois, si je prends une photo vraiment cadrée sur la peinture, bon ok voilà c’est là, c’est un mur mais on sait pas trop. Si y’a un truc autour, la vie, la pierre, un changement de couleur avec le ciel, c’est important.

Même moi ça m’est déjà arrivé, à l’époque où je faisais beaucoup beaucoup de friches, je partais la journée mais j’essaie de me démerder pour toujours avoir une boussole avec moi pour voir, au moment où je termine la peinture, pour pas avoir le soleil dans la gueule. Pour pas me faire 200 km et avoir une photo à contre-jour.

Et après quand je peux, l’histoire de la maison abandonnée avec la télé là, la pièce était très sombre, tous les volets étaient cloués, du coup j’étais obligé d’utiliser un trépied, pause longue.

Après ça m’est aussi déjà arrivé de peindre dans un club échangiste, les murs étaient noirs, il y avait plus d’électricité, y’avait pas un pet de lumière, j’ai peint au projo et pour la photo j’avais ramené des bougies, des petites leds et tout, j’ai fait une grosse ambiance, pareil une pause longue pour la photo. Ça a fait une photo super belle c’est assez spécial mais pour moi la photo elle fait partie de l’œuvre car c’est que ça qui reste au final.

tu repasses voir tes œuvres ?

Ça m’arrive, surtout dans la rue comme ça parce que tu vois par exemple il y avait le « repose en paix Monique », ça me fait chier que quelqu’un l’ait effacé, je comprends pas, tu vois bien que c’est pour quelqu’un qui est mort.
Du coup j’ai des copains qui me disent « ah ton truc a été… ». Après voilà c’est aussi le jeu. On est dans la rue, si la mairie elle me repasse, c’est comme ça. Faut l’accepter.

y a un mur que tu aimes, une fierté particulière ?

Non, non. J’ai dû en faire plus de 1000 et sur les 1000, y’en a 3 que j’aime vraiment mais parce que la photo est bien, c’est pas forcément le dessin en lui-même c’est aussi parce que la photo est bien, j’ai réussi à capter une ambiance, à capter un truc ou à faire une pause longue avec des lumières.

c’est lesquels ?

C’est celui donc du coup dans le club échangiste abandonné, c’est vraiment cool car y’a une barre de pole dance, une cage, des murs noirs …

et la mise en scène ?

J’ai fait du coup une poulette qui danse le long de la barre et y’a un poulet qui est à coté du bar et qui a la mâchoire qui tombe en mode Tex Avery, celle-là j’aime bien.

Y’en a une autre que j’ai faite dans une coopérative viticole abandonnée où j’ai fait un poulet qui tient un verre de vin tu sais qu’il fait tournoyer comme ça. En fait on voit toute la coopérative, j’ai fait au grand-angle, on voit tout ce lieu qui est gigantesque et le petit poulet est là, on voit les cuves.

Et l’autre c’est celle que j’ai faite dans la maison abandonnée avec le poulet qui regarde la télé avec les yeux…C’est 3 là je les aimes bien car la photo est cool, ça raconte quelque chose, y’a une ambiance.

plutôt exceptionnel comme environnement !

Ouais c’est atypique.

Et maintenant, on se fait plaisir en découvrant Monsieur Poulet à l’œuvre !

le mur de monique

Monsieur Poulet
Street art Bordeaux
jamais grandir
Monsieur Poulet
Monsieur Poulet

Crédit photos David Da Silva

les photos du poulet dans la ville

Poulet et Lacoulure
Monsieur Poulet
Petit Poulet
Poulet A-MO
Poulet landais

Crédit photos David Da Silva

d’autres photos en bonus, cadeau du poulet himself

CV
Monsieur Poulet
Street art Bordeaux
Monsieur Poulet
CV

Crédit photos Monsieur Poulet

Alors, ça t’a plus d’en savoir plus sur Monsieur Poulet ? il est plutôt cool ! Laisse-moi un ptit commentaire en fin de page !

Pour suivre Monsieur Poulet, rends-toi sur son Insta et son site internet.

Envie de lire d’autres articles ? Déniche des idées de balades ci-dessous

5 1 vote
Article Rating
Fleur explore Bordeaux
3
0

Inscris-toi à la newsletter du blog pour ne manquer aucun article !

En cadeau, 15 idées de balades pour te ressourcer en pratiquant le slow tourisme

En t'abonnant à cette newsletter, tu acceptes la Politique de Confidentialité.

Merci et bienvenue sur le blog !

Pin It on Pinterest

Share This