À la découverte d’un métier : le vigneron 

Peu après la création du blog, j’ai lancé la série d’articles : « à la découverte d’un métier ». Je voulais partir à la rencontre de personnes exerçant des métiers et savoir-faire emblématiques de la Gironde et au-delà ! J’ai déjà eu le plaisir de parler à Fabien de la tonnellerie Nadalié ou encore à Philippe, ostréiculteur à Andernos, à Jean-Louis Duverger, le maître horloger de la Grosse Cloche et Michel Cessateur, ancien fontainier à Bordeaux.

Aujourd’hui, je suis ravie de poursuivre la série en te présentant le métier de vigneron. Avec plus de 5000 viticulteurs en Gironde, c’est un incontournable !

Direction le château Pey-Labrie dans le Fronsadais pour discuter avec Éric Vareille, vigneron propriétaire.

 

Vigneron, viticulteur… Quelle est la différence ?

Un viticulteur s’occupe de la vigne : la plantation, la conduite du vignoble… Cela pour apporter au chai la meilleure vendange possible. Un vigneron s’occupe de l’ensemble du processus de fabrication et de commercialisation du vin : de la naissance du raisin jusqu’à la vente de ses crus.

 

Le métier de vigneron, Rencontre avec Éric et Sylvie Vareille

 

Le parcours d’Éric

Vigneron. Une vocation pour Éric qui a grandi au milieu des vignes. Son père Marcel acquiert château Pey-Labrie en 1961 et dès son plus jeune âge, Éric s’investit dans la propriété.

Après l’école, il rejoignait son père pour l’aider dans le vignoble. Puis, après avoir étudié la viticulture et l’œnologie, il fait son stage au château, et à 18 ans, il s’installe à Pey-Labrie pour seconder son père.

Un de ses souvenirs les plus mémorables est lorsque son père lui transmet la propriété, en 1988. Quelle fierté que de recevoir Pey-Labrie !

Au fil du temps, Éric s’est entouré de consultants et d’œnologues pour discuter des dernières pratiques développées en viticulture et vinification. Il développe ainsi la propriété. Le vignoble passe de 6 à 13 hectares. Les installations techniques évoluent, des cuves et des machines sont ajoutées, les chais agrandis, une cave souterraine construite…

 

Le quotidien du vigneron

Comme tu peux te l’imaginer, le quotidien d’Éric est bien chargé. Entre l’entretien des vignes, des sols, les vendanges, la vinification, l’élevage, les assemblages, la commercialisation et l’aspect administratif de la gestion d’une propriété viticole, le programme est dense ! Heureusement, son épouse Sylvie se consacre aux ventes et aux visites.

Éric est un matinal. À 6h, au petit-déjeuner, il lit des revues spécialisées comme « l’Avenir Aquitain » ou « l’Union Girondine » pour s’informer des dernières pratiques ou réglementations. Puis, si ce n’est pas la période de vinification, il s’octroie un p’tit : une balade autour de sa propriété sur le chemin de randonnée. Je te parlais d’ailleurs de cette balade pédestre la semaine dernière.

Son quotidien est rythmé par les saisons. En hiver, il faut tailler les vignes pour les préparer à la prochaine récolte. En septembre, il faut vendanger les raisins et les vinifier (transformer le vin en alcool)…

Voici plus en détail, ce qui occupe les journées du vigneron.

 

La conduite de la vigne selon les saisons

Printemps

En mars / avril, lorsque les températures sont plus clémentes, la vigne sort de sa dormance pour débuter son cycle végétatif.

Les bourgeons éclosent et forment de nouveaux rameaux, c’est la phase de débourrement. Ces jeunes rameaux sont sensibles aux gelées printanières.

Comme tout vigneron, Éric redoute les gelées qui peuvent décimer tout un vignoble. En 2017, ses vignes en bas du coteau en ont souffert. Ces aléas climatiques induisent un stress permanent chez le vigneron.

Il faut décavaillonner les pieds de vigne de la petite motte de terre (le cavaillon) qui a servi à protéger la vigne durant l’hiver.

Entre avril et juin, le vigneron ébourgeonne ses vignes. Il se sépare des rameaux indésirables qui auraient poussé plusieurs fois sur un même bourgeon car ils gênent la production de la vigne.

Les rameaux conservés sont attachés à un palissage. Grâce à des fils de fer, celui-ci soutient la vigne et oriente sa croissance. Le palissage aide à parfaire l’aération du feuillage (qui réduit la concentration d’humidité et les risques de pourriture) ainsi que l’exposition (qui favorisera la maturation des raisins).

Lorsque les feuilles ont poussé, la croissance de la vigne se poursuit rapidement grâce à la photosynthèse. La vigne capte la lumière, le CO₂ et l’eau du sol pour produire du sucre et de l’oxygène.

Puis, de mai à juin, à la floraison, les fleurs apparaissent et forment une grappe.

 

Été

Entre mai et juin, il faut épamprer la vigne : arracher les jeunes pousses, les gourmands, qui naissent sur le tronc et ne donnent pas de raisins.

En juillet, les fleurs se transforment en minuscules grains de raisins, c’est la nouaison.

Le vigneron peut aussi éclaircir son vignoble. Il se sépare alors des grappes encore vertes pour faciliter la maturation des grappes conservées. Ce sont les vendanges en vert. Il effeuille aussi la vigne pour, encore une fois, maximiser l’exposition des grappes au soleil et l’aération.

Lors de la véraison, en août, les baies commencent à changer de couleur : rouges et violets pour les cépages rouges, translucides et dorés pour les cépages blancs.

Le rameau se lignifie et devient un sarment.

 

Automne

En septembre, Éric est aux aguets dans son vignoble. Il surveille la météo et l’évolution de ses grappes, car bientôt, il faudra vendanger.

La pluie peut abîmer les baies et les faire pourrir. Si le soleil est présent, Éric peut retarder la vendange pour qu’arômes, sucres et tannins continuent de se concentrer dans la grappe.

Pour savoir quel est le moment le plus propice pour récolter les raisins, il faut vérifier leur maturité. Des prélèvements sont effectués tous les deux jours pour faire analyser les baies par un œnologue. Y-a-t-il assez de sucre ? Quel est le taux d’acidité ?

Rien ne vaut l’expérience du vigneron pour prendre ces décisions cruciales.

Il faut, à Éric et son équipe, 8 à 10 jours pour vendanger à la main les 13 hectares de vignoble.

 

Hiver

Avec le froid, la vigne entre en période de dormance.

C’est pendant cette saison qu’Éric taille ses vignes. C’est une étape cruciale et déterminante car elle façonne la vigne (qui, sans taille, pousserait sans fin et de manière anarchique). Elle détermine également le nombre et l’emplacement des bourgeons qui produiront des raisins. J’en parlais d’ailleurs avec Stella Puel du château Bardins.

Il existe plusieurs techniques de taille. Les plus connues sont la taille en guyot simple ou double et Cordon de Royat. Dans mon article sur le château Nodot, je te parlais aussi de la taille Guyot-Poussard adaptée à la biodynamie.

Éric pratique la taille Guyot en laissant sur le pied de vigne, une baguette (Guyot simple) ou deux (Guyot double) selon la vigueur de sa vigne. Il s’assure que les grappes, lorsqu’elles seront développées, soient séparées les unes des autres.

En plus des travaux saisonniers de la vigne, il faut s’occuper des parcelles, des réparations diverses, de la replantation du vignoble, la mise en bouteille du vin…

Ce qui préoccupe Éric, c’est le dépérissement du vignoble. Après quelques années de production, la vigne meurt.
Constaté depuis 40 ans, un observatoire du vignoble et de son état sanitaire a été mis en place pour déterminer les causes du phénomène et envisager des solutions.

 

Comme pour la conduite de la vigne, il existe différentes pratiques pour la vinification. C’est le vigneron qui décide quelle est la plus adaptée à ses besoins. Ici, j’aborde les méthodes pratiquée par Éric, notre vigneron au château Pey-Labrie.

 

La vinification

Lors des vendanges, les raisins sont réceptionnés au chai. Un tri supplémentaire des baies peut être effectué pour retirer tout élément indésirable à la récolte. Puis, le vigneron transforme le jus des raisins en vin. C’est le processus de vinification. Éric choisit de vinifier sa récolte parcelle par parcelle.

Afin d’obtenir un vin de qualité, plusieurs étapes sont nécessaires.

 

Éraflage et foulage

L’éraflage sépare la rafle des baies. Le foulage fait éclater la peau des baies pour en libérer le jus ou le moût.

 

La macération

Pour obtenir un vin rouge, il faut extraire la couleur et les tannins de la peau en la macérant et la brassant dans le jus. Différentes techniques de macération et d’extraction sont possibles. C’est le vigneron qui décide, selon le style de vin désiré, quelle est la plus adaptée pour son vin.

 

La fermentation alcoolique

Le sucre présent dans le raisin se transforme en alcool et en CO₂ grâce à l’action des levures. Ce processus génère de la chaleur et, parce que la fermentation s’interrompt entre 35°C et 38°C, le contrôle de la température est crucial pour le vigneron. La fermentation peut durer de quelques jours à trois semaines.

Éric préfère réaliser ses fermentations dans des cuves en béton. Grâce à leur bonne inertie thermique, il est plus aisé de travailler sous des températures constantes. Il choisit aussi de macérer les parties solides, le marc, avec le jus pendant la fermentation. L’action du CO₂ soulève le marc en haut de la cuve pour former ce qu’on appelle un « chapeau ».

Éric se souvient avoir vinifié sans pouvoir contrôler les températures du moût. Celui-ci, déjà bien chaud dans les cuves, fermentait sans qu’il puisse avoir le temps de le travailler. Les techniques ont bien évolué depuis.

Afin d’extraire au mieux les tannins et la couleur, Éric arrose le chapeau en faisant des remontages. Il soutire le vin depuis le bas de la cuve avec une pompe qui le réinjecte par le haut. Cela brise et noie le chapeau.

La fermentation se poursuit, en principe, jusqu’à ce que les levures aient consommé la totalité du sucre.

 

Le pressurage

À la fin de la fermentation, chapeau et jus sont séparés. Le chapeau est pressé pour obtenir le vin de presse. Celui-ci, regorgeant de couleur et de tannins, peut être utilisé dans l’assemblage d’un vin.

 

La fermentation malolactique

Lorsque la fermentation alcoolique est terminée, une seconde fermentation débute pour adoucir l’acidité du vin, toujours dans les cuves en béton chez Éric. Les bactéries transforment l’acide malique (comme celui présent dans une pomme) en acide lactique (que tu connais dans le lait).

 

Élevage

Après la fermentation, Éric met son vin dans des barriques de chêne. Selon la cuvée, le vin sera élevé entre 12 et 18 mois.

Ce temps d’élevage en barriques permet, outre les échanges entre vin, bois et air, la sédimentation naturelle des lies (ou levures mortes) et des dépôts présents dans le vin qui seront retirés lors du soutirage.

 

La commercialisation

Un autre aspect primordial du métier de vigneron est la commercialisation de ses vins.

Depuis plus de 50 ans, c’est grâce au bouche-à-oreille, aux récompenses reçues lors de concours et à la presse que l’activité du château Pey-Labrie s’est développée.

Éric et Sylvie s’efforcent de recevoir chaque visiteur personnellement et chaleureusement. Au fil des années, les liens avec leurs clients se tissent, la confiance s’acquiert et ces derniers reviennent régulièrement pour acheter leurs vins.

 

L’administratif

Aujourd’hui, le suivi administratif peut prendre beaucoup de temps dans la vie d’un vigneron car il est très pointu.

Éric, dont le vin est commercialisé sous l’appellation Canon-Fronsac, applique bien entendu la réglementation du cahier des charges concernant la densité de plantation, la sélection des cépages, la taille, le palissage, le rendement…

Il enregistre toutes les données et les interventions concernant sa production sur un tableau de bord. Il faut en effet pouvoir identifier, selon la réglementation sur la traçabilité, quelle parcelle constitue un certain lot de bouteilles ainsi que toutes les opérations intermédiaires.

Il y a de nombreux registres à tenir, les entrées des produits, des fiches de paie à émettre, des documents douaniers à compléter…

Éric se concentre sur ces tâches de bonne heure avant de partir au chai ou dans la vigne.

 

Rendre visite à Éric et Sylvie au château Pey-Labrie

Crédit photos David Da Silva

Pour venir découvrir la propriété, passe un coup de fil à Sylvie au 05 57 51 65 17 ou 06 07 89 39 40. Les visites sont du lundi au samedi. Est-ce que la découverte du métier de vigneron t’a plu ? Laisse-moi un commentaire en bas de page.

 

Belles découvertes de la Gironde !

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